LP Voice in the Wilderness

Rob Clearfield, le pianiste qui fait pleuvoir des étoiles

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Des clubs de Chicago aux studios feutrés, Rob Clearfield a longtemps été l’ombre portée des aventures de Makaya McCraven. Le pianiste s’offre un virage à la lumière : un album dense, précis comme une lame, doux comme une pluie d’été sur l’asphalte

Avec Voice in the Wilderness, sorti le 23 mai, Rob Clearfield signe une œuvre qui parle autant aux rêveurs qu’aux arpenteurs du jazz contemporain, entre swing retenu, harmonies raffinées et improvisations nimbées d’une lumière presque spirituelle. Une porte d’entrée idéale vers les chemins fertiles de la scène de Chicago tout en ouvrant la voie à de futures collaborations où Clearfield pourrait bien devenir le guide discret mais nécessaire d’une nouvelle génération de musiciens modernes. Entre trio intimiste et quartet incandescent, Clearfield réconcilie le feu créatif de la scène chicagoane avec un lyrisme rare, porté par Joe Sanders, Fred Pasqua, Itamar Borochov, et la patte affûtée de Makaya sur deux titres ; un disque pour ralentir le pouls, juste ce qu’il faut…

Chicago Respire Sous ses Doigts

Photo Rob Clearfield
Rob Clearfield DR

On le savait accompagnateur précieux, à l’écoute, capable de naviguer dans les polyrythmies de Makaya McCraven avec ce mélange de concentration et de relâchement que seuls les musiciens de Chicago savent doser. On découvre ici un leader au souffle large, capable de faire de chaque silence un écho qui résonne longtemps. L’héritage d’une ville qui a vu naître des voix libres – de Sun Ra à la Chicago Underground – vibre à travers ses harmonies fines, sans jamais sacrifier la simplicité de l’émotion.

L’album alterne entre trio et quartet, mais jamais ne perd son fil : celui d’une écriture qui embrasse la mélodie sans la dompter, laissant le temps à chaque note d’exister. Joe Sanders, entendu chez Gerald Clayton ou Charles Lloyd, offre une contrebasse souple comme un fleuve, pendant que Fred Pasqua habite la batterie avec une retenue complice. Quant à Itamar Borochov, sa trompette vient parfois fendre l’espace avec la clarté d’une aube après la pluie.

“What I’m trying to do is to keep my ear out for what’s there and try to let the music guide me.” – Rob Clearfield

Makaya, Discret et Présent

Photo Rob Clearfield
Rob Clearfield DR

Deux titres sont produits par Makaya McCraven. Son empreinte s’y devine : groove léger, textures aérées, grain soyeux. Mais ici, pas d’effet d’annonce, pas de surcharge : la production reste au service du toucher délicat de Clearfield, lui offrant une respiration dans laquelle ses phrases s’épanouissent, tout en gardant ce goût de live qui caractérise la scène de Chicago, même en studio.

Ce disque n’est pas là pour briller, il est là pour dire, sans dire. Pour parler à ceux qui ont besoin d’une pause dans le flux continu des jours, à ceux qui aiment écouter le jazz comme on écoute la pluie tomber sur une vitre un matin de printemps, à ceux qui cherchent un espace où se déposer, loin du bruit et de la vitesse. Et si le jazz moderne avait encore besoin d’une preuve qu’il peut émouvoir sans artifices, cet album de Rob Clearfield le murmure avec élégance. Le genre de disque qui accompagne les jours sans en faire trop, tout en vous rappelant que parfois, il suffit de fermer les yeux pour voir plus clair.

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