LP Can't Call !t

Entre groove et vertige intérieur, Can’t Call ! de Karizma

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Douze ans après Wall of Sound (2013), Karizma présente Can’t Call !t, un double album dense et mouvant, comme une mosaïque du présent, celui d’un monde qui change, et d’un producteur qui refuse toujours de se laisser enfermer dans un registre

House, soul, hip-hop, électronique : Karizma traverse les genres comme on traverse des humeurs. Can’t Call !t réunit 17 morceaux, conçus entre pulsation et introspection, dans une tension féconde entre la danse et le doute. Un disque qui ne cherche pas à séduire mais à exister, à respirer dans le brouillard du temps qui passe…

Entre deux mondes

Photo Karizma
Karizma DR

Douze ans se sont écoulés depuis Wall of Sound (2013). Entre-temps, tout a basculé : des clubs ont fermé, les écrans se sont allumés, la house a mué. Karizma (alias Christopher Clayton) a pris ce recul comme une respiration. Sur Can’t Call !t, il avance sans nostalgie : son groove n’a rien perdu de sa précision, mais s’accompagne désormais d’une gravité subtile, presque méditative. Les rythmes sont là pour porter autre chose : une quête d’équilibre dans un monde désaccordé. L’artiste n’a jamais choisi son camp : il préfère les zones de frottement, les ponts entre downtempo et deep house, soul et electronica. Ici, chaque titre agit comme un plan séquence, Where!vebeen en ouverture dessine un horizon ; Deepw!de suspend le temps ; H!t Bottom (avec Atjazz) fait remonter la lumière. Rien n’est figé : le tempo, l’énergie, la forme même du morceau se déplacent comme des plaques mobiles.

« What has remained constant is Karizma’s commitment to constantly pushing the boundaries of his sound and defying categorisation. » – Rough Trade, 2025

Le son d’un monde qui doute

Draw Karizma
Karizma DR

La force du disque tient à sa manière d’accueillir l’incertitude. Karizma écrit avec ses machines, mais aussi avec ses silences. La texture du son, toujours tactile, garde ce lien à la chaleur analogique ; les basses enveloppent, les claps respirent. C’est une écriture du présent, lucide, presque mélancolique, mais profondément physique. Chaque track semble interroger : que reste-t-il du collectif ? que devient la transe quand le monde s’effrite ? Une sagesse de producteur, Can’t Call !t n’a pas la flamboyance d’un “come-back”, il a la maturité d’une traversée. Karizma y déploie un savoir-faire affûté mais sans esbroufe : structure, groove, mixage, tout respire la précision du geste.

Ce n’est pas un disque qui crie : il écoute, observe, relie. Derrière la technique, il y a une conscience : celle d’un producteur qui ne veut pas « rester » mais « continuer ». Karizma ne signe pas un retour : il ouvre un cycle. Can’t Call !t est un disque de transition, peut-être, mais surtout de transmission. Un album à écouter comme une conversation avec le temps, entre mémoire du club et clairvoyance de l’instant. Un disque qu’on ne peut pas nommer, mais qu’on peut ressentir longtemps.

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