Alexis Taylor, le frontman de Hot Chip, se lance dans une escapade solo avec un nouvel album : Piano (2016, Moshi Moshi – La Baleine)
Hot Chip, c’est six albums studio et de nombreux EP, des singles, des inédits pour des compilations, des remixes et des reprises. Alexis Taylor, le leader du groupe, a sorti deux albums et un EP sous son propre nom, ainsi que trois albums avec About Group en plus de ses nombreuses collaborations, Peter Gabriel, Booji Boy High, Wiley, Will Oldham, Robert Wyatt, Justus Köhncke, David Byrne… Le 10 juin 2016, sortait Piano, son escapade en solo.
Alexis Taylor, Piano
Sorti en juin dernier, Piano a été enregistré aux studios de Hackney Road par Shuta Shinoda. Le disque invite l’auditeur à un récital très privé, le piano et la voix ayant été capturés live afin de préserver la beauté de l’instant. Alexis Taylor présente une interprétation de ses textes, nouveaux et anciens, ainsi qu’une sélection de reprises. Le travail, épuré et personnel, célèbre la vie de ceux qui l’ont perdue, mais aussi l’amour des siens et la musique elle-même. Ce disque, Alexis Taylor l’a toujours souhaité, et ce depuis quelques années. Ses premiers travaux ont donné le second album de About Group, mais l’idée d’un solo lui était restée en tête…
Après l’avoir achevé, ça m’a frappé, Piano est comme un disque gospel, mais athée si possible : ‘In The Light of the Room’, ‘Crying In The Chapel’ d’Elvis, ‘I Never Lock That Door’, et la référence au miracle de ‘So Much Further To Go’ sont dans cet esprit. Pour moi, la vie est un miracle, un miracle difficile à supporter.
Alex Taylor, interview
Houz-Motik. Avec ce disque l’auditeur imagine qu’Alexis Taylor est dans son salon, notamment parce que Piano est l’un de ces voyages musicaux de l’intime. Ce travail introspectif te permet d’être au coeur de la création tout en étant plus proche du public ?
Je crois que cela fonctionne bien si tu l’écoutes à la maison, ou au casque. Je ne sais pas trop ce que cela donne avec une sono plus importante, je crois que ce n’est pas mal mais j’ai l’impression que l’on entend davantage de détail au casque. Cela dit je ne souhaite pas faire d’ordonnance au public, il choisit lui-même sa façon de l’écouter. De toute façon, de par son format, oui c’est peut-être une écoute un peu différente d’une autre, on n’est pas tout à fait captivé de la même manière…
Je m’en suis rendu compte en terminant l’album, je n’avais jamais imaginé une diffusion radio et lorsque je l’ai entendu sur une station, je me suis dit que c’était une sortie de moment où le temps s’arrête pour cette écoute. D’ailleurs après l’avoir terminé, et pendant les essai de mixage, je l’écoutais en marchant dans Londres, où dans mes voyages, et j’ai ressenti cette quiétude, alors qu’il y a cette pollution sonore urbaine tout autour de nous. Cela crée cette atmosphère étrange, assez sereine voire presque protectrice. Ce n’était pas l’intention de départ, mais j’aime cet effet, cette émotion.
C’est cet effet que j’ai souhaité rendre au public, et c’est p-e le même effet que j’ai quand j’écoute les disques qui m’ont influencé. J’ai grandi et évolué avec toutes ces références, je n’étais pas conscient de leur importance avant d’avoir terminé l’album, mais cela m’est revenu en tête, alors maintenant quand je présente mon disque j’essaie d’y donner une voie d’accès en parlant de ces oeuvres. Je repense aussi à un autre disque, qui me donne cette émotion, c’est Mark Hollis, album éponyme du chanteur du groupe Talk Talk, son album solo est l’un des plus beaux disques que j’ai jamais écoutés. C’est très épuré, ça commence juste en piano voix, puis d‘autres instruments se greffent au fur et à mesure, c’est vraiment très profond, c’est une très belle influence.
Récemment j’enregistrais avec Joe (Hot Chip), il m’avait envoyé des instrumentaux, j’ai écrit des textes et, même si l’on se voit régulièrement, c’était la première fois depuis longtemps que l’on n’avait pas travaillé comme cela. J’y ai pris beaucoup de plaisir, pas seulement parce que c’est un projet différent du dernier disque, mais ce qu’il produit m’influence beaucoup.
Je crois que j’ai toujours besoin des deux aspects, travailler seul, et collaborer. C’est vrai qu’au départ j’ai débuté seul, à la guitare, je jouais seul en soirée, mais les gens m’ont connu avec le groupe. Parfois on me demande : “cela ne vous paraît pas étrange de jouer seul ?”. “Est-ce difficile ?” ou encore “vous êtes courageux…”. Mais, en fait, c’est naturel pour moi. C’est juste que je ne l’avais pas fait depuis longtemps.
En revanche, il y a des gens que l’on entend toujours en solo, et c’est parfois plus difficile d’imaginer ces voix singulières dans un contexte de groupe, je pense notamment à Sinead O. Connor, parfois je me demande à quoi cela pourrait ressembler si elle était invitée sur un disque de Hot Chip, ou de n’importe quel autre groupe…
Hot Chip n’est pas un groupe ouvertement engagé, mais nous y sommes sensibles et chacun dans le groupe a sa façon d’en parler… Pour moi, la façon d’en parler pourrait davantage ressembler à un texte romantique entre deux personnages, sur comment trouver sa place dans le monde, avec un sens métaphysique. Mais il y a plusieurs chemins…