Enregistré directement sur cassette 4-pistes sans amplis, le nouvel album de The Modern Folk mêle expérimentation analogique, jazz libre et folklore détraqué
Avec Modern Folk Electronic Ensemble, The Modern Folk livre un album lo-fi radical où se mêlent folk déconstruit, jazz libre et textures analogiques. À travers ce chaos maîtrisé, le groupe revendique une esthétique de la contrainte et de l’expérimentation. Un disque brut et habité qui pose une question essentielle : et si la vérité musicale naissait de l’imperfection assumée ?
Persister dans la folie : une sagesse magnétique

“If the fool would persist in his folly, he would become wise.” La citation de William Blake en ouverture donne le ton : Modern Folk Electronic Ensemble est un disque qui avance tête baissée dans ses obsessions, jusqu’à en révéler une forme de sagesse sonique. Paru le 18 avril 2025, cet album brut et hypnotique, enregistré directement sur un Tascam 4-pistes à cassette sans amplis, est autant une expérience d’écoute qu’un manifeste esthétique.
Sous l’impulsion de J. Moss (guitares, synthés, boîte à rythmes, basse, manipulations sur bande), Amelia Riggs (batterie) et Chad Beattie (sax alto, Fender Rhodes), Modern Folk Electronic Ensemble navigue à la lisière du folk déformé, de l’electronic lo-fi, et d’un free jazz astral. On entend l’électricité brute des machines, les timbres analogiques usés par la bande, des souffles saturés, des harmonies suspendues entre deux mondes…
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Esprits libres sur bande magnétique

L’absence d’amplis n’entrave rien : au contraire, elle accentue le caractère domestique, intime et volontairement expérimental du projet. Il y a quelque chose de profondément artisanal ici — un amour pour les moyens modestes, une esthétique du “fait main” qui rappelle autant les pionniers de l’avant-folk psychédélique que les bidouillages électroniques de la scène underground américaine. La présence du Fender Rhodes apporte une douceur contrastée au jeu nerveux du saxophone, pendant que la batterie de Riggs structure et libère tour à tour le chaos ambiant. Les textures s’imbriquent dans un désordre organisé, une pulsation instinctive — presque rituelle.
L’ensemble est maîtrisé par Andrew Weathers, dont le travail de mastering respecte la rugosité originelle tout en donnant de l’espace aux détails enfouis dans la bande. Ce n’est pas un album qui se livre facilement. Il faut accepter de persister dans la folie, comme le suggère Blake. D’écouter les recoins du souffle, les oscillations du magnétisme analogique, les traces humaines dans la matière sonore. Mais pour celles et ceux qui s’y plongent, Modern Folk Electronic Ensemble est une œuvre précieuse, à la fois anachronique et furieusement contemporaine — une alchimie rare entre abandon et précision. Une œuvre artisanale et hypnotique qui fait de la contrainte une esthétique, et de la bande magnétique un territoire d’exploration spirituelle.
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