LP Ma Gitala

“Ma Gitala” : quand la rue entre en studio – Le groove tendre et inarrêtable du Madalitso Band

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Habitués à faire vibrer les trottoirs de Lilongwe et les scènes alternatives d’Europe, les deux acolytes du Madalitso Band franchissent une nouvelle étape. Avec Ma Gitala, leur troisième album sorti sur Bongo Joe, ils troquent le plein air pour les murs feutrés du studio — sans jamais perdre le souffle libre qui les anime. Une mue douce et maîtrisée, entre authenticité acoustique et élans d’invention

Sur Ma Gitala, le Madalitso Band creuse son sillon avec toujours autant de cœur, et avec cette exception : les possibilités offertes par l’enregistrement studio. Ce virage leur permet d’affiner les contours de leur musique sans la figer, d’ajouter des couleurs nouvelles à leur palette artisanale. Le résultat : un album lumineux et intime, enraciné dans la tradition mais ouvert à la surprise, qui élargit encore un peu plus le cercle des amateurs conquis. Prochaine étape ? Une tournée mondiale, ou pourquoi pas, la bande-son d’un film en quête de sincérité. Ma Gitala est disponible depuis le 13 juin 2025 sur Bongo Joe Records…

Des trottoirs à la console de mixage : un saut sans filet

Photo Madalitso Band
Madalitso Band DR

Depuis leurs débuts autodidactes dans les rues du Malawi, Yobu Maligwa et Yosefe Kalekeni avancent au flair. Leur musique, bricolée à la main, s’écoute autant qu’elle se vit. Le babatoni — sorte de contrebasse à une corde fabriquée maison — dialogue avec une guitare en picking percussif. Ensemble, ils produisent une transe acoustique qui évoque aussi bien les danses de village que les grooves répétitifs du blues du Delta. Mais cette fois, pas de micros de scène ni de public autour : Ma Gitala est né dans la concentration feutrée d’un studio. Et pourtant, la magie demeure…

Ce troisième disque est un petit laboratoire d’intuitions musicales. Kwela, gospel rural, folk africain, bluegrass ? Les étiquettes glissent sur la peau de cet album comme des gouttes de pluie sur une tôle chaude. Yobu et Yosefe s’autorisent des superpositions de voix, des percussions délicatement tapées, quelques éclats d’harmonies inattendues. Il y a, dans Ma Gitala, une jubilation tranquille : celle d’artisans qui sculptent leur son à l’oreille, sans manuels ni filtres, avec pour seules boussoles la complicité et l’instinct.

« On ne savait pas vraiment ce qu’on faisait, mais on savait que c’était juste. »— Yobu Maligwa

Chaleur analogique et narrations intimes

Photo Madalitso Band
Madalitso Band DR

Le studio ne fige pas leur musique, il l’ouvre. Là où leurs précédents albums saisissaient l’énergie directe du live, Ma Gitala explore des émotions plus tamisées, des récits en demi-teinte, parfois presque intérieurs. On devine des souvenirs d’enfance, des blagues de famille, des gestes transmis. Le disque est aussi habité par les voix d’amis ou de proches invités en toute simplicité. Une manière, pour le duo, de prolonger le cercle — de l’intime à l’universel — sans rien perdre de sa chaleur analogique.

Avec Ma Gitala, Madalitso Band ne change pas de cap, mais il affine sa trajectoire. Là où d’autres se diluent en studio, eux approfondissent leur singularité. Leur musique reste un hymne à la débrouille joyeuse, au groove sans artifices, à la beauté cachée des choses simples. Le disque séduira autant les fidèles du label Bongo Joe et de la musique africaine que les amateurs de folk planant, de musiques du monde réinventées, ou de minimalisme organique. Un pas de côté, certes, mais une ligne droite vers l’essentiel ; à écouter d’urgence : dans un casque au lever du soleil, ou en boucle sur la route des vacances…

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