LP Emerald Tablet

Tablette d’émeraude, alchimie hip-hop selon Potatohead People & Slippery Elm

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Ils auraient pu se contenter d’un beat jazzy et de refrains confortables, mais non… Potatohead People et Slippery Elm signent Emerald Tablet, une odyssée sensuelle et cosmique, entre hip-hop, jazz fusion et neo-soul, où le groove devient langage, le souffle devient paysage, et la voix raconte ce que nos nuits nous murmurent ; un disque qui caresse l’âme sans jamais l’endormir

Avec Emerald Tablet, le duo canadien Potatohead People s’associe au flow de velours de Slippery Elm pour un album à la fois accessible et audacieux, où le hip-hop flirte avec le jazz, la soul et les étoiles. On y trouve des textures raffinées, des basses profondes et des mélodies gorgées de lumière, entre Nightbird, hypnotique et enveloppant, et Up Close avec Bahamadia en invitée, scintillant comme une conversation intime sous la lune. Un disque qui ouvre sur des perspectives multiples : la vitalité de la scène de Vancouver, le retour du live dans le hip-hop, et l’envie de disques qui racontent des histoires sans sacrifier le groove…

Les constellations du groove

Photo Potatohead People
Potatohead People DR

On le sent dès les premières secondes de Nightbird : ce disque est une invitation à lever les yeux, à se laisser traverser par un groove moelleux sans renoncer à la précision. Slippery Elm y déploie un phrasé fluide, à mi-chemin entre spoken word et chant soul, sur des beats qui sentent la poussière de vinyle et le piano Rhodes fumant. Potatohead People (AstroLogical et Nick Wisdom) font briller ici leur science de la production organique : tout respire, tout groove, mais rien n’est figé.

L’album joue le rôle d’un sommelier de la vibration : il marie le velouté des cuivres de Thad Bailey-Mai et David Mergens avec des lignes de basse puissantes, sur lesquelles Slippery Elm se déploie sans forcer, comme une conversation nocturne qui se transforme en confidence. Up Close, avec Bahamadia, devient un point culminant : voix grave, flow souple, texte poétique, sur une prod qui scintille comme un orage en slow motion. La maîtrise de l’espace sonore rappelle qu’un beat peut être à la fois dense et respirant ; leur hip-hop se déguste comme un bon vin.

« I don’t want to ride the wave, I want to feel the tide. » – Slippery Elm, sur Nightbird

Des histoires qui marchent dans la nuit

Slippery Elm apporte plus qu’une voix, il livre des histoires, des images, des atmosphères. On croise des oiseaux de nuit, des ruelles éclairées par des lampadaires jaunes, des sourires entre deux gorgées de vin rouge, des instants suspendus dans le noir. C’est un disque qui prend le temps de poser une ambiance, d’installer des personnages, sans tomber dans le storytelling forcé : ici, le groove est le narrateur silencieux, et les instruments la ponctuation de ce qui ne se dit pas.

Ce qui marque dans Emerald Tablet, c’est la cohérence entre intention et résultat : il s’agit vraiment d’un album qui nourrit. Nourrit les oreilles par ses détails instrumentaux, nourrit le corps par ses grooves syncopés, nourrit l’esprit par ses paroles qui, sans être moralisatrices, invitent à la douceur, à l’empathie, à l’attention. Les arrangements subtils (le violon de CRUSH, les percussions de Kai Basanta, les chœurs de Kendra Dias) donnent au disque une chaleur qui manque à tant de productions lisses. Et c’est bien ce qu’on ressent en écoutant Emerald Tablet : une vague de groove, oui, mais surtout une marée qui nous traverse, nous porte, nous berce et nous réveille. À écouter les yeux fermés, ou dans les rues d’une ville encore tiède après la pluie.

 

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