Derrière les façades policées et les vitrines horlogères de Genève, un autre récit s’écrit depuis dix ans. 2015-2025 : Les Disques Bongo Joe – 10 Years of Sonic Explorations ne déroule pas un simple « best of », mais une traversée des marges, des mémoires migrantes et des paysages sonores qui échappent aux cadres établis
Vingt-trois titres choisis, du maloya de La Réunion au psychédélisme turc, en passant par la cumbia contemporaine ou les pulsations industrielles. Le label Bongo Joe s’affirme en cartographe sensible des cultures périphériques et des collisions créatives. Plus qu’une anthologie, une conversation planétaire qui ouvre sur l’évolution de l’avenir…
Archéologies mélodiques…

Alain Peters, Africa Negra, Les Abranis… autant de noms qui rappellent que les musiques oubliées continuent de battre, remises en circulation grâce à un patient travail d’archéologue. Ces morceaux sont des points d’ancrage, des repères d’une mémoire vivante. Des confrontations interculturelles : de Derya Yıldırım à Meridian Brothers, d’Altin Gün aux dialogues entre guitares électriques et rythmes traditionnels, le disque expose des croisements où la joie le dispute à l’expérimentation. Ici, la collision n’écrase pas, elle fertilise.
“The Geneva-based label releases 10 Years of Sonic Explorations, a compilation that captures a decade of handcrafted work, collective vision, and sonic adventures. It’s not a “best of,” but a vivid snapshot of what drives the label” — Rough Trade.
Frictions expérimentales

Le spectre s’assombrit parfois : la transe métallique d’Esplendor Geométrico ou les collages minimaux de Yīn Yīn ouvrent sur des paysages industriels, où la répétition se mue en transe. Une autre face de l’identité Bongo Joe, qui assume l’inconfort comme moteur. Genève métissée : on y croise Cyril Cyril, Hyperculte ou encore l’Orchestre Tout Puissant Marcel Duchamp. Scène locale mais ouverte, laboratoire d’idées où l’énergie genevoise se frotte à des héritages venus d’ailleurs. C’est ce creuset qui fait du label un lieu unique, une communauté plutôt qu’une simple structure de distribution. Au fil de ces vingt-trois fragments, Bongo Joe rappelle qu’un label peut être un foyer, un espace commun. La musique s’y entend comme une écologie humaine — fragile, inventive, et toujours à réinventer.