Quatrième escale d’un voyage bien entamé : Drifted Vol. 4 étire la cartographie intime de Wahn jusqu’au Japon. Après la France, la Bulgarie et l’Allemagne, l’artiste rennais ancre cette nouvelle dérive sur FORM@ RECORDS, comme une respiration dans un tunnel de brume
Toujours fidèle à un ambient tellurique, sculpté dans la basse profonde et les textures lentes, Wahn creuse ici un sillon plus diaphane. Le disque garde son épaisseur mélancolique mais laisse filtrer des lueurs, de petites éclaircies au piano, comme des signaux dans la nuit. Une continuité assumée, mais en même temps une transformation sensible, vers un ailleurs émotionnel, vers une géographie élargie…
L’ancrage : ces basses qui tiennent debout

La première écoute agit comme une traction vers le bas. Non pas la lourdeur, mais un poids nécessaire. Un socle. Chez Wahn, la basse n’est pas un décor, elle respire, elle pulse doucement, elle porte la matière atmosphérique sans jamais l’écraser. Dans Drifted Vol. 4, cette profondeur devient presque tactile. Elle rappelle ces nuits où l’on marche en silence, guidé seulement par la vibration sourde du monde. Quand la lumière insiste malgré tout, vient alors ce glissement inattendu, l’obscurité s’éclaircit. Sans trahir la gravité de la série, Wahn ménage des zones de transparence. Le piano, discret, posé par touches espacées, fait office de balise émotionnelle. Il ne raconte rien, il suggère. Il ne console pas, il respire. Ces échappées donnent au disque une amplitude nouvelle, comme si un paysage intérieur se dévoilait sous une pluie fine.
« Each volume of the series is released on a different label in a different country, tracing fragile lines of connection across borders. »
— FORM@ RECORDS
Diagonales du monde

La série Drifted se distingue par son mouvement : un volume, un label, un territoire. Cette règle, presque rituelle, tisse une géographie fragile faite d’affinités plutôt que de stratégies. Le passage au Japon n’a rien d’un geste exotique. Il s’aligne naturellement avec la sensibilité de FORM@ RECORDS, connu pour sa curiosité envers l’ambient profond, les textures cinématiques, l’IDM qui préfère le murmure à l’éclat. Ce quatrième chapitre ressemble alors à une correspondance, Bretagne ↔ Tokyo, deux mondes qui se reconnaissent dans la même retenue. Constante et métamorphose : Wahn avance sans renier quoi que ce soit. L’ADN est là, lenteur, densité, gravité. Mais quelque chose a changé, presque imperceptible, comme une peau qui s’assouplit.
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Drifted Vol. 4 donne le sentiment d’une continuité qui se fissure volontairement, une mutation douce, un désir d’espace. La série gagne ainsi en perspective, en altitude, en humanité peut-être ? La dérive devient moins sombre, plus poreuse, comme si une part du monde extérieur s’y infiltrant, ouvrant la possibilité d’un retour à la surface. Avec ce nouveau volume, Wahn poursuit son chemin comme on suit un courant discret à rythme régulier, tel un coureur de fond. Un disque qui étire l’obscurité jusqu’à y trouver un peu de lumière, preuve que même les dérives les plus lentes finissent par ouvrir des horizons.


