Sous le nom In Transit, Dave Huismans (alias A Made Up Sound, 2562, ex_libris) livre une œuvre suspendue dans un entre-deux : ni vraiment ambient, ni totalement rythmique. Composée en 2013 et peaufinée pendant plus d’une décennie, cette traversée sonore trouve son port d’attache chez FELT. Entre introspection et architecture sonore, Huismans invente une forme de calme vibrant, dense comme la mémoire d’un trajet que l’on n’a jamais fini
Avec In Transit, Dave Huismans (alias A Made Up Sound, 2562, ex_libris) signe un retour tout en nuance après plus d’une décennie de silence. Composé en 2013 sur un sampler Korg ESX puis lentement affiné, l’album explore la frontière entre rythme et immobilité. Six pièces ambient denses et texturées où les battements se déplacent comme des repères mouvants au sein d’un paysage sonore en perpétuelle transformation. Sorti sur FELT et masterisé par Miles Whittaker, In Transit évoque le temps suspendu, la patience et la beauté fragile des choses inachevées…
Dave Huismans n’a jamais été du genre pressé. Le Néerlandais, que l’on connaît pour avoir redéfini les structures rythmiques de la techno sous ses divers alias (A Made Up Sound, 2562), s’est ici offert un long détour temporel. In Transit a été conçu en deux semaines, en 2013, sur un simple sampler Korg ESX, puis il a mûri pendant douze ans, comme un vin qu’on laisse respirer dans l’ombre. Cette patience, palpable dans chaque strate, donne à l’album une texture presque photographique : le grain du son porte les traces du temps.
Sur les six titres, Huismans explore le ralenti sans jamais s’enliser. Les beats, décentrés, parfois évanescents, deviennent des repères flottants. Les couches de sons, elles, se superposent comme des halos, synthés liquides, percussions étouffées, échos électriques. Rien n’est stable, tout oscille, et c’est précisément dans ce flottement que se loge la tension du disque. In Transit n’est pas un disque de contemplation passive, c’est une forme d’énergie contenue, prête à déborder.
Chaque morceau semble capturer un instant en train de se dissoudre. On y entend encore les réminiscences du dub abstrait de 2562, la rigueur du design sonore d’A Made Up Sound, mais tout cela se fond dans un langage plus intérieur. Huismans, photographe à ses heures, signe aussi les images du disque, brouillard, reflets, transparences, la même grammaire visuelle d’un monde en suspens. Le titre, emprunté à la romancière néerlandaise Hella S. Haasse, renforce cette idée : le transit comme condition existentielle.
Sorti sur le label FELT, In Transit s’inscrit dans une lignée de disques tactiles, organiques, où le son semble respirer. Masterisé par Miles Whittaker (Demdike Stare), l’album trouve un équilibre rare entre rigueur et émotion. Derrière l’apparente retenue, on devine un besoin de renouer avec le geste, le simple fait de manipuler une machine et d’écouter ce qu’elle raconte. Chez Huismans, la technologie n’est jamais froide : elle devient prolongement du souffle. Avec In Transit, Dave Huismans signe un retour tout en discrétion et en justesse. Ni démonstration, ni nostalgie, mais un point d’équilibre entre passé et devenir. Une œuvre qui, à force d’attendre, atteint ce que peu de disques osent encore : la grâce du silence en mouvement.