Paru une première fois en 2018, puis reconfiguré au fil du temps, Palm Mall Mars de 猫 シ Corp. revient en 2025 dans une version remasterisée publiée sous licence My Pet Flamingo. Plus qu’une réédition, un rappel à l’ordre : certains disques ne cherchent pas à évoluer, mais à persister
Palm Mall Mars n’est ni un album conceptuel au sens narratif, ni un simple jalon vaporwave. C’est un espace sonore autonome, un décor figé entre nostalgie synthétique et futur périmé. La version 2025 de 猫 シ Corp. ne le modernise pas : elle le stabilise, comme on restaure un lieu abandonné sans jamais le rouvrir au public…
Le mall comme paysage mental
猫 シ Corp. DR
Chez 猫 シ Corp., le centre commercial n’est pas un symbole ironique. C’est un milieu. Un environnement climatisé, neutre, sans conflit apparent, où la musique ne sert qu’à lisser l’expérience. Palm Mall Mars détourne ces bandes-son fonctionnelles, easy listening, ambient factice, muzak étirée, pour en révéler la fatigue interne. Rien n’est agressif, mais tout est usé. Mars, extension logique du vide : Mars n’est pas une promesse, c’est une couche supplémentaire d’abstraction. Un nom plaqué sur un non-lieu déjà vidé de sa fonction. Ici, la planète rouge agit comme un slogan : elle déplace le décor sans en changer la logique. Même architecture sonore, même immobilité feutrée. Le futur n’arrive pas. Il est déjà obsolète.
“Vaporwave is about memory, decay, and the ghosts of capitalism.” — Adam Harper (Dummy Magazine).
Remasteriser sans corriger
猫 シ Corp. DR
La remasterisation ne cherche pas la netteté. Les textures restent volontairement troubles, les dynamiques contenues, les transitions molles. Tout ce qui ferait “sonner moderne” est écarté. C’est un choix cohérent : Palm Mall Mars repose sur la persistance, pas sur la mise à jour. Le disque gagne en homogénéité ce qu’il refuse en brillance. Un projet verrouillé. Les contributions (SEPHORA脳バイブス, Mindspring Memories), le travail graphique de Christopher Hansen, le design obi de VANITAS命死 : tout s’inscrit dans un cadre strict. Aucun élément ne cherche à tirer la couverture. Palm Mall Mars fonctionne comme un système fermé, où chaque détail renforce l’impression d’un monde autonome, coupé de toute chronologie réelle. Palm Mall Mars ne cherche ni à séduire ni à convaincre. Il observe, il maintient, il diffuse. Dans un présent saturé de nouveautés jetables, cette lenteur assumée, presque immobile, agit comme un rappel discret : certains futurs sont déjà derrière nous.