Artwork cover de l'album Maloo de Maylee Todd

Le quatrième album de Maylee Todd est né dans un métavers

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Paru le 4 mars 2022 chez Stones Throw, le nouvel album de Maylee Todd explore notre psychologie dans l’ère du temps et des espaces avec l’avatar Maloo

Chanteuse, compositrice, productrice de musique et artiste multimédia expérimental canadienne basée à Los Angeles, Maylee Todd sort Maloo chez Stones Throw (J Dilla, Madlib, Washed Out, Dam Funk…). Ce quatrième album se présente comme une perspective ludique sur la vie numérique et son impact sur la santé mentale, explorant les thèmes de la psychologie, de la science-fiction et du futurisme via des berceuses electronica néo-soul racontées par un avatar numérique habitant un métavers utopique appelé The Age of Energy… Un projet remarquable, au-delà du mignon !

Maylee Todd dévoile Maloo

Maylee Todd portrait
Maylee Todd DR

Pour partager sa musique et ses projets, Maylee Todd est adepte des approches non conventionnelles. Après la sortie d’Act of Love (Do Right! Music, 2017), elle fait le tour du pays avec Virtual Womb, une installation présentant un planétarium musical immersif dans lequel les spectateurs·trices entrent par une vulve géante en tissu… Que ce nouvel album s’inspire de son travail de designer en réalité virtuelle ne nous étonne donc pas, une démarche d’idiosyncrasique selon notre confrère du magazine Toronto Star.

J’évolue toujours, avec chaque album que je sors, il y a une nouvelle version de moi-même et de nouvelles technologies que je peux explorer.

L’histoire suit donc le voyage de Maloo vers une planète dont la durabilité dépend de la santé mentale et du bien-être de ses habitants. Sur le fond, l’œuvre imaginative, riche de science-fiction, est une critique satirique des médias sociaux souvent en décalage de l’art de la performance. Pour la forme, le disque présente des balades electronica, tendance dream pop, pratiquement toutes composées avec un instrument électronique japonais, le vertigineux Teneri-on. Bien évidemment, l’artiste a créé un univers visuel, décliné en clip vidéo…

Le parcours de Maylee Todd

C’est à Toronto que Todd grandit, entourée d’artistes plus ou moins excentriques – un père imitateur d’Elvis et un grand-père artiste de l’évasion obsédé par les OVNIS. Elle débute au milieu des années 2000, en s’intégrant aux espaces créatifs de la ville, comme l’Artscape Gibraltar Point sur l’île de Toronto, ou le Kapisanan Philippine Center, “Toutes les communautés dont je faisais partie étaient très expérimentales, j‘étais dans un groupe qui comptait environ 20 personnes, et cinq d’entre nous avaient des tambourins et criaient, tandis qu’une autre personne se contentait de couper une pastèque à côté”, se souvient-elle amusée.

Todd sort trois albums solo pour le label indépendant canadien Do Right Records, trois disque remarquablement distinct d’un point de vue sonore, comme une feuille de route de ses multiples transformations. Son premier, Choose Your Own Adventure (2010), oscille entre folk, soul et bossa nova, et capture l’esprit d’une jeune artiste débridée à la recherche de son identité musicale. Elle change de cap en 2013 avec Escapology, un disque funk-soul plutôt scintillant et exubérant, qui a fait sensation au Japon, deux singles se distinguent notamment dans le palmarès Tokio Hot 100. En 2017, Acts of Love récolte des éloges, cette fusion R&B et électro pop, principalement auto-produite et sophistiquée, lui permet d’embrasser l’art de la performance décalée.

Dans le métaverse, j’ai passé Noël à me saouler avec une bande de codeurs du monde entier

Depuis, Todd a travaillé avec Occupied VR à Toronto, une entreprise de technologie immersive où elle s’est spécialisé dans la construction de mondes, la conception de personnages et la technologie de capture de mouvement. Désormais installée à Los Angeles, elle s’est lancée dans l’animation 3D, et développe des applications bêta métavers. Elle a par ailleurs collaboré avec le comédien Eric Andre pour créer un NFT intitulé “Non-Flushable Turd”. Comme beaucoup, l’arrivée de la pandémie fut une période très difficile, mais la réalité virtuelle lui apporte un certain confort, elle peut alors rencontrer des gens dans des salles simulées, “J’ai passé Noël à me saouler avec une bande de codeurs du monde entier. Et c’était réel ! (…) Dans le métaverse, vous pouvez aller vers quelqu’un et parler, car il y a un son spatial à 360°, vous pouvez donc avoir une conversation comme si vous étiez à une fête. C’était la chose la plus proche de la socialisation pour moi”.

Ce sont ces expériences qui lui permettent d’aboutir à la création de Maloo, son projet animé par des questions sur les possibilités utopiques de la technologie : « Et si on imaginait le métavers comme un lieu de création artistique, plutôt qu’un lieu de travail ? Et si la réalité virtuelle pouvait être utilisée comme un outil de développement personnel et de croissance personnelle, au lieu de remplacer la connexion humaine ? ». Pour Todd, cet album est un moyen de réinventer la façon de partager les concepts, l’art et la manière dans nos choix de présenter nos identités numériques « nous accordons trop d’importance au statut, à la richesse et à l’influence sur les réseaux sociaux. Et si nous trouvions des moyens de partager nos rêves et nos objectifs pour nous-mêmes et pour la société ? ». (Propos recueillis par Richie Assaly pour le Toronto Star, ndlr)

Antoine Brettman est un bricoleur d'images et de sons... Son travail s'inscrit dans le courant de l’art vidéo par la réappropriation d'œuvres audiovisuelles, où il exploite la virtualité des images afin de confronter au monde réel son recyclage d'histoires.

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